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Dominique déguste … le Moulin à Vent « Les Rouchaux » 2007 de Jean-Pierre Mortet

Parler du Beaujolais « hors saison », ce n’est pas que s’ancrer au large du funeste 3ème jeudi de novembre, repeint au bojonouvo. C’est aussi redire que la vraie saison du beaujolais … c’est toute l’année.

 
Souvent cantonnés par les dédaigneux dans la cour des vins « sympathiques », les grands beaujolais -ceux des crus- marchent, voire piétinent, les plates-bandes de biens des bourguignons voisins.

Il est cruel d’avoir à réaffirmer sans cesse le talent de ces vins capables de rire dans leur jeunesse et de scander le talent du gamay … même après 30 ou 40 ans de sommeil en cave.

Encore la faute au paravent du vin primeur, frêle arbrisseau qui cache la forêt des plus belles essences.

5- Moulin a Vent - Mortet - Rouchaux

Comme ce Moulin à Vent 2007 « Les Rouchaux », de Jean-Pierre Mortet. Sis à Romanèche-Thorins, le domaine n’est pas le plus médiatique, ce que trahit l’étiquette, qui semble tracée au sang du XIXè siècle. Croisé la première fois à la dérobée dans la pénombre d’une cave, ce 2007 méritait que l’on examinât de plus près -et plus longuement- ses atours de cerise et son talent de metteur en joie.

 
« Rouchaux » 2007 raconte un vin à plusieurs vies. La première, celle que peu sont près à payer cher, celle du fruit, de l’éclat effronté. La seconde, ingrate comme peut l’être l’adolescence, pourrait être celle de l’autisme et de l’oubli nécessaire « en attendant que jeunesse se passe ». L’autre enfin, celle qui nous intéresse, lorsque le gamay a quitté les rives du fruité immédiat pour se muer en vin mature.

 
Pas chiffonné, évidemment pas bodybuildé, ce 2007 donne du sens aux termes apogées et plénitude, illustrées ici par les épices douces, la rose fanée et le sourire de mes amis. Il me rappelle une autre histoire contée par un autre fin gamay : un Morgon 1934 dégusté à l’aveugle chez le négociant Chanson. Ou plutôt non : lui aussi racontait le génie du beaujolais.

 
En Beaujolais, 2007 n’est pas le grand millésime que s’arrachent les buveurs d’élite.

En revanche, il peut construire d’autres réputations, plus secrètes : celle du buveur averti qui sait lire entre les vignes.

 

Dégustation
vin de demi-corps
effluves douces de rose fanée, épices calmes

gelée de groseille, dattes sèches

d’abord fin, aérien, très long

puis corsé, bordé d’humus

à boire sur 3 ans

jean-pierre mortet │ moulin à vent « les rouchaux » │ 2007

100 % │ gamay noir à jus blanc

patine en fûts │ pas de fûts neufs

volaille fine poisson de mer & épices

 

Post-scriptum

Attention, avant de boucler la valise, inutile de tourmenter le Gps : dans la liste des villages qui abritent des crus (Fleurie, Saint Amour, Morgon, Brouilly, …) ne fouillez pas : le Moulin-à-Vent ne paraît sur le cadastre que sous forme de parcelles partagées sur les villages de Romanèche-Thorins et Chénas. En revanche, le moulin, s’il ne brasse plus beaucoup de vent, existe toujours. Sémaphore du bon goût et appeau à pinarologues, il est le phare qui invite l’amateur à slalomer entre les crus.

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